La bipolarité est un trouble complexe qui affecte profondément la vie de ceux qui en souffrent et leur entourage. Associé à des sautes d’humeur extrêmes, le trouble bipolaire est souvent mal compris et peut entraîner des comportements perçus comme hostiles ou méchants. Mais est-il juste de parler de « méchanceté » quand une personne bipolaire agit de manière agressive ou blessante ?
Comprendre la bipolarité : Les symptômes et cycles bipolaires
Le trouble bipolaire, autrefois appelé psychose maniaco-dépressive, se caractérise par des oscillations extrêmes de l’humeur. Les individus affectés alternent entre des phases maniaques (ou hypomaniaques) et des épisodes dépressifs, avec parfois des périodes de stabilité entre les deux. Lors des phases maniaques, la personne peut se sentir euphorique, avoir une énergie débordante, un besoin de sommeil réduit, et prendre des décisions impulsives. À l’opposé, les épisodes dépressifs sont marqués par une profonde tristesse, une fatigue intense, un désintérêt général pour la vie, et parfois des pensées suicidaires.
Ces fluctuations ne sont pas uniquement émotionnelles ; elles peuvent affecter les comportements, la perception des relations sociales, et la capacité à réagir de manière appropriée aux situations quotidiennes. Ces comportements, notamment dans les phases maniaques, peuvent être perçus comme agressifs ou cruels par l’entourage, même si la personne n’a pas l’intention de faire du mal.
La bipolarité influe sur les relations avec les proches de manière significative. En phase maniaque, une personne peut avoir des réactions brusques, désinhibées ou imprudentes. Par exemple, elle pourrait dire des choses blessantes ou agir d’une manière qu’elle ne reconnaîtrait pas en période de stabilité. Durant la phase dépressive, elle peut être distante, irritable ou se refermer complètement sur elle-même. Ces changements peuvent perturber les interactions et donner l’impression de comportements hostiles ou injustes.
Cependant, il est important de souligner que ces comportements ne sont généralement pas délibérés. Le trouble bipolaire affecte la capacité à réguler les émotions, ce qui explique pourquoi certains actes ou paroles peuvent être mal interprétés par les proches, comme de la méchanceté ou de la malveillance.
Différencier la méchanceté de la maladie
Comportements impulsifs vs intentionnalité
Il est crucial de distinguer la méchanceté, qui implique une intention de nuire, des comportements impulsifs dus à un état de santé mentale altéré. Une personne bipolaire en phase maniaque ou dépressive peut avoir du mal à contrôler ses paroles ou ses actions. Les excès de colère, l’agitation ou l’agressivité peuvent résulter d’une impulsion plutôt que d’un désir conscient de blesser.
L’intentionnalité est donc un élément clé pour comprendre la distinction entre la maladie et un comportement volontairement cruel. Par exemple, une personne bipolaire en crise peut insulter ou rejeter quelqu’un, mais ces actions résultent souvent de la perte de contrôle émotionnel plutôt que d’un choix conscient de faire du mal.
Les distorsions cognitives liées aux émotions
Dans les phases maniaques ou dépressives, les personnes bipolaires peuvent avoir une vision déformée de la réalité. La perception des événements, des relations et des interactions sociales est souvent altérée. Cela peut entraîner des réactions inappropriées ou disproportionnées face à des situations qui, en temps normal, ne susciteraient pas de telles réponses.
Ces distorsions cognitives sont fréquentes dans les troubles de l’humeur, notamment lorsqu’une personne est convaincue que tout le monde est contre elle (en phase dépressive) ou que rien ne peut lui arriver (en phase maniaque). Cette déformation de la réalité peut mener à des comportements perçus comme égoïstes, méchants ou malveillants par l’entourage, bien que la personne atteinte ne soit pas pleinement consciente de son propre état.
Ressentiment ou manque de contrôle ?
Il est important de comprendre que la majorité des comportements négatifs observés chez une personne bipolaire sont davantage liés à un manque de contrôle qu’à un ressentiment véritable. L’agressivité ou l’irritabilité peut être l’expression d’un stress émotionnel non géré, exacerbé par les symptômes de la maladie.
La bipolarité affecte également la capacité à gérer les frustrations, les désaccords ou les conflits. Il peut sembler, pour ceux qui entourent la personne malade, qu’elle agit de manière délibérée pour blesser. En réalité, il s’agit souvent d’une incapacité temporaire à gérer les émotions intenses ressenties à ce moment-là.
Les facteurs aggravants
Stress et fatigue
Le stress est un facteur déclencheur commun qui peut aggraver les symptômes bipolaires et exacerber les comportements perçus comme hostiles. Un emploi du temps chargé, des tensions familiales ou professionnelles, ainsi qu’un manque de sommeil peuvent favoriser les épisodes maniaques ou dépressifs. La fatigue, en particulier, est souvent un élément catalyseur des comportements impulsifs, car elle réduit la capacité à contrôler ses émotions et ses réactions.
Une personne en période de stress intense est plus susceptible de dire ou de faire des choses blessantes sans en mesurer pleinement les conséquences, d’où l’importance de la gestion du stress dans le traitement du trouble bipolaire.
Les abus de substances
Il est courant que certaines personnes bipolaires tentent de gérer leurs symptômes en consommant de l’alcool ou d’autres substances. Malheureusement, ces comportements ne font souvent qu’aggraver les épisodes maniaques ou dépressifs. L’alcool, par exemple, peut désinhiber et entraîner des comportements encore plus impulsifs ou agressifs.
De plus, certains médicaments mal adaptés peuvent également provoquer des effets secondaires nuisant à la stabilité émotionnelle, renforçant ainsi les comportements perçus comme méchants.
L’absence de traitement ou de suivi
La gestion de la bipolarité repose essentiellement sur un traitement médical et psychothérapeutique adapté. Sans un suivi régulier, les symptômes peuvent s’aggraver, augmentant ainsi la probabilité d’agissements impulsifs ou agressifs. Un manque de traitement peut également compliquer la compréhension mutuelle entre la personne malade et son entourage, car les comportements négatifs ne sont pas contrôlés.
Gérer les comportements perçus comme méchants
L’importance du diagnostic et du traitement
Un diagnostic précoce du trouble bipolaire permet de mieux comprendre les comportements de la personne affectée. Le traitement, qu’il soit médicamenteux (stabilisateurs de l’humeur, antidépresseurs) ou psychothérapeutique, joue un rôle crucial dans la réduction des symptômes et dans la gestion des comportements. Lorsque les phases maniaques et dépressives sont maîtrisées, la probabilité de comportements impulsifs diminue considérablement.
Rôle de l’entourage
Il est primordial que les proches d’une personne bipolaire comprennent que les comportements blessants ou agressifs ne sont pas toujours dirigés contre eux. Il peut être utile de se rappeler que ces comportements sont le reflet de la maladie, et non de la véritable personnalité de la personne atteinte. Le soutien, la patience et la compréhension jouent un rôle essentiel dans l’amélioration de la communication et des relations interpersonnelles.
Développer l’empathie et la communication
Pour atténuer les conflits et les malentendus, il est nécessaire de favoriser une communication ouverte et bienveillante. L’empathie permet de mieux appréhender les défis auxquels fait face la personne bipolaire, et d’adopter une attitude moins réactive face aux comportements impulsifs. En mettant en place des outils de gestion des émotions, l’entourage peut aussi contribuer à créer un environnement plus apaisé, qui limite les déclencheurs de crise.
Conclusion
La bipolarité ne doit pas être confondue avec la méchanceté. Les comportements agressifs ou blessants observés chez une personne bipolaire ne sont pas le reflet d’une intention de nuire, mais bien des symptômes d’un trouble complexe qui affecte la régulation des émotions. Il est essentiel d’adopter une approche empathique et de favoriser un environnement stable pour permettre à la personne bipolaire de mieux gérer ses épisodes et de réduire les tensions dans ses relations. La prise en charge médicale et le soutien psychologique sont indispensables pour une meilleure compréhension et gestion de ces comportements.